Des élues de gauche réclament la suppression de la clause de conscience sur l'IVG. Cette dernière autorise les médecins à refuser la pratique de l’avortement.
Faut-il encore autoriser les médecins à refuser de pratiquer une interruption volontaire de grossesse (IVG) ? Cette question a provoqué de vifs débats à l’Assemblée nationale, vendredi 22 mars. Et pour cause : des députées du Parti socialiste (PS) et de La France Insoumise (LFI) cherchent à supprimer la clause de conscience spécifique à l’IVG, qui s’ajoute à la clause de conscience pour l’ensemble des actes médicaux. Via celle-ci et au nom de ses «convictions personnelles, professionnelles ou éthiques», un médecin a donc le droit de refuser de pratiquer un avortement.
Pour l’élue PS Sylvie Tolmont, cette disposition est «superfétatoire» et conforte l'idée que l'IVG est «un acte à part». Quant à Caroline Fiat (LFI), elle considère que «cette double clause de conscience» mise «à l'époque pour faire passer la loi» Veil de 1975 n'a «plus lieu d'exister». Avant d’ajouter que la supprimer serait «une belle occasion 44 ans après de prolonger la belle œuvre de Mme Veil».
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Agnès Buzyn s’y oppose
De son côté, la ministre de la Santé Agnès Buzyn est formelle : supprimer la clause est une «fausse bonne idée». Selon l’ancienne belle-fille de Simone Veil, cela compliquera le parcours des femmes et n’améliorera pas l’accès à l’avortement. «La clause de conscience permet d'afficher quelque part clairement les intentions, observe-t-elle. Ça va éviter aux femmes de prendre rendez-vous avec des médecins qui éventuellement peuvent leur faire perdre du temps s'ils sont contre l'IVG et qu'ils ne sont pas dans la clause de conscience avec l'obligation de trouver un médecin», prêt à la pratiquer.
Agnès Buzyn, qui était hématologue avant de se lancer en politique, poursuit : «La clause de conscience, elle affiche la couleur. Ce n’est pas génial, je suis d'accord, mais je pense que pour les femmes en situation de détresse, ça apporte beaucoup plus de garanties d'un parcours simple que de la supprimer». Néanmoins, tout médecin qui refuserait de pratiquer une IVG se doit d’informer «sans délai» l'intéressée de son refus, puis lui «communiquer immédiatement le nom de praticiens ou de sages-femmes susceptibles de réaliser cette intervention», rappelle la ministre.
Les médecins restent partagés
Qu’en pensent les professionnels de la santé ? Là encore, les avis divergent. Le 14 septembre dernier, le médecin féministe Martin Winkler appelait dans une tribune publiée sur le site AOC, à «en finir avec l’aberration légale de la clause de conscience». Cinq jours plus tard, le président du Collège national des gynécologues (CNGOF) Israël Nisand le contredisait, dans le journal 20 minutes, en affirmant que celle-ci était «sacrée». Tandis qu’un collectif de professionnelles de santé réclamait le même jour, dans une tribune publiée dans Le Monde, sa suppression pour que «l’IVG devienne un droit effectif.»